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vous êtes ici : INDEX / Voyages / Québec 2023 / J12 |
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Météo : ciel clair puis mitigé avec vent d’ouest forcissant. Températures fraîches |
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Quelques outardes vinrent de leur cri sonner le réveil matinal et l’heure du petit déjeuner avec l’eau déjà chaude pour tous. Ces quelques moments de quiétude avant que la troupe n’émerge constituaient pour moi de vrais moments de communion avec la nature, m’interrogeant même volontiers sur ma présence en ces lieux. Pour la première fois ce matin-là, alors que nous en avions parlé ensemble à de nombreuses reprises, je mesurais notre chance de pouvoir traverser ces lieux sans le moindre moustique alors que l’on m’avait décrit ces bois comme de véritables nids pour ces nuisibles agressifs obligeant à porter de pénibles protections et à se badigeonner d’aérosols nauséabonds. Pour moi, seul participant de cette expédition à n’avoir pas pris part à une précédente édition, la situation était presque normale alors qu’à l’évidence, cela était exceptionnel. Quelques spécimens nous avaient bien incommodé à la veille du départ sur la rivière de Maurès mais depuis, plus rien, pas l’ombre de l’indésirable insecte assoiffé de sang humain. Exceptées quelques libellules énormes, nous rencontrions en fait assez peu d’insectes. A quel phénomène pouvait-on attribuer la cause de la disparition du redoutable moustique – ou maringoin pour les initiés – canadien ? Nul ne le savait vraiment, parmi nous en tout cas. Les incendies peut-être ? Le réchauffement climatique ? les deux cumulés ? Quoiqu’il en soit, nous nous accommodions très bien de cette situation certes inhabituelle mais très agréable. Le Québec sauvage dans ces conditions, sans ce parasite, était selon leurs dires, une expérience nouvelle très plaisante. |
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D’un pas pressé, motivé également par la fraîcheur matinale, Jean rythma le démontage du campement avec des consignes claires. Dés 6 h 50, tout le monde était sur l’eau, bateau chargé, avec pour objectif d’atteindre une île 18 km plus en aval avec une plage une nouvelle fois abritée des vents d’ouest. Le topo indiquait cet endroit comme un beau lieu de campement deux km seulement après un beau rapide classé R3. La flottille empruntait d’abord un petit bras vers l’est avant d’obliquer vers le nord pour un peu plus d’une dizaine de km à parcourir dans cette direction. Au terme de quelques méandres plus au moins étroits avec un courant significatif, l’étonnant lac Mesgouez était atteint. « Etonnant » car selon le topo, ce lac était constitué d’une multitude d’étendues d’eau parfois séparées par des rapides, ce qui paraissait assez surprenant pour nous qui avions coutume d’identifier un lac comme une pièce d’eau sans rupture de pente. Encore un mystère qui ne fut pas résolu. Afin de nous épargner une navigation pénible face au vent, nous avions opté pour une route au plus près des rives à l’ouest, quitte à faire un peu plus de distance que prévu, Ce choix, qui se révéla vite pertinent, fut aussi l’occasion de rencontrer une nouvelle fois des ours, trois cette fois, qui déambulaient sur les rochers entre l’eau et la ripisylve. Celle rencontre eut le mérite de casser un peu la monotonie de ces interminables traversée de lac. Au plus près de la rive, nous laissions toutes les îles rencontrées à l’est sauf une car le passage du côté de la rive, pourtant indiqué sur le topo, n’existait plus. Il fallut donc faire le tour de cette dernière île avant de pouvoir nous rapprocher enfin des deux rapides de l’étape dont le fameux classé R3, dernier rapide significatif de notre voyage. Avec cette étonnante anomalie du lac Mesguez réparti sur plusieurs niveaux, nous ne savions pas vraiment si ce passage existait encore ou si celui-ci avait été noyé par le barrage de la Rupert situé en aval. Rapidement, nous nous rendions compte qu’il n’en était rien, le rapide était bien là avec ses gros rouleaux et ses trajectoires peu évidentes au premier abord. Après un premier passage R1 qualifié à juste titre de « maigre » par le topo, nous parvenions à l’amont du passage R3. Nous débarquions en amont en rive gauche pour le reconnaître et déterminer la meilleure trajectoire. Il s’agissait d’un passage assez long de plus de 300 mètres de longueur. Comme à la coutume, il y eut débat entre les partisans de la voie de droite et ceux de la voie de gauche. Ce fut la voie de gauche qui l’emporta avec trois passages parfaits sans le moindre contact avec les rochers. Tout le monde s’arrêta dans un contre-courant en aval immédiat du passage. Jean et denis sortait aussitôt leurs cannes à pêche dans l’espoir de pouvoir profiter des eaux vives pour attraper une ou deux truites. Ce furent finalement deux nouveaux brochets de bonne taille, de quoi redonner le sourire à nos pêcheurs après plusieurs jours sans la moindre prise. |
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Les deux km suivant pour atteindre la plage furent un peu laborieux face au vent qui avait sensiblement forci en se maintenant obstinément dans le secteur ouest. Sur place, force fut de constater que le niveau de la Rivière Rupert, à la différence de celui de la Natastan, était extrêmement bas. Cela laissait en bas de la plage quelques zones marécageuses moins agréables que le sable blanc. On pouvait s’en plaindre mais y avait-il une plage à proximité sans ce phénomène. Rien ne le garantissait et le topo n’annonçait rien en ce sens dans les environs immédiats. Nous restions donc là pour établir le campement qui s’avéra finalement très confortable. Comme la veille, chacun vaquait à ses occupations une fois le campement établi. Pour ma part, je partais en canoë à la découverte des lieux en effectuant un tour complet de l’île où nous avions débarqué espérant bien faire la rencontre d’un orignal après celle de l’ours. A mon grand regret, je n’eus pas cette chance mais je pus malgré tout me consoler avec les très beaux paysages qui jalonnèrent le parcours de ma petite balade solitaire. Au passage, je repérais le passage nord que nous allions devoir emprunter le lendemain en constatant que celui-ci était balayé par un fort clapot de ouest-nord-ouest. La rivière contournait une belle colline aux formes inhabituelles dégarnie au sommet sans doute à la suite d’un incendie survenu quelques années auparavant. Au campement, toute le monde profitait de la météo globalement clémente pour s’accorder une petite sieste réparatrice à l’abri du vent. |
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Après quoi, il fallut débattre ensemble pour déterminer la meilleure stratégie à adopter pour parcourir en 4 jours la trentaine de km qu’il nous restait à parcourir. Compte tenu du modeste nombre de campements possibles indiqués par le topo ou repérés sur les vues satellite, le choix des options n’était pas pléthorique. Nous ébauchions alors un plan d’approche de l’arrivée à la manière de navigateurs approchant d’une terre inconnue. Celui se composait de trois étapes en quatre jours, soit un jour de repos sur la côte nord de la Rupert près d’un petit estuaire au km 350. Bien sûr, toute cette planification dépendait de la situation climatique mais il fallait bien avancer des propositions de solution pour gérer au mieux notre progression vers la fin de notre voyage et notre sortie du bois. Nous ne disposions d’aucune info météo sinon les indications plutôt optimistes communiquées par Luc quelques jours plus tôt à l’occasion de la liaison téléphonique par satellite. Dans cette nouvelle programmation, l’étape du lendemain était estimée à une dizaine de km à peine. Cette distance très raisonnable motiva certains à prôner un départ moins matinal, mais c’était une fois encore obérer le risque de laisser passer une fenêtre d’accalmie avant le retour de vents forts. Au cours du repas, aucune décision ne fut réellement prise à ce sujet, les délicieux brochets pêchés puis préparés par Denis occupèrent toutes nos pensées. |
A l’écriture de ces lignes, à la lumière de ma frontale le soir venu dans la tente, je me rends compte que je suis ici confronté à la difficulté de citer les lieux de nos étapes, comme de la plupart des lieux que nous traversons. Dans nos territoires anthropisés, la toponymie est abondante et souvent riche des lieux cités. Mais ici, l’espace est si grand et si peu fréquenté par l’homme qu’aucun contemporain ne semble s’être soucié de nommer lacs, collines et autres points remarquables pourtant nombreux. On trouve bien des cartes détaillées mais uniquement avec le nom des plus grandes collines et rien d’autres sinon les courbes de niveau sur de vastes espaces. Cela ne signifie pas que personne ne connait correctement ces lieux. Sans doute les populations autochtones qui vivaient là aveint une connaissance fine de leur territoire mais sans avoir nécessairement le souci de tout nommer avec peut-être des évocations orales plutôt qu’écrites. Ce sujet est passionnant, je m’y intéresserai à notre retour pour en savoir plus. Autre question de cette soirée bouillonnante de pensées : Comment devient-on homme des bois ? Cela interroge notre capacité à survivre dans cette nature sauvage. En sommes-nous capables ? S’agit-il d’une qualité innée ou cela s’apprend t-il par nécessité ? par exemple à l’issue d’une mésaventure totalement imprévue telle qu’un crash d’avion au milieu de nulle part sans aucune idée du lieu où l’on se trouve, sans matériel et sans vivres. Nombreux sont les récits d’expériences similaires vécues avec des issues plus ou moins heureuses ou plus ou moins dramatiques. Certains ont survécu, d’autres n’ont pas réussi à s’adapter et ont disparu, littéralement avalés par la nature sauvage, sans le moindre état d’âme. Un homme (ou une femme) issu (e) de notre monde contemporain, pourrait-il (elle) survivre dans cet environnement à priori hostile ? Nos vies modernes nous ont profondément éloignés de ce rapport à la nature et nous sommes à présent grandement dépendants de nos conditions artificielles. Cela dépend sans doute de l’aptitude de chacun à accepter la nature telle qu’est est sans chercher à lui imposer ses propres représentations. Une question existentielle profonde. Dans notre cas, même si les collègues font preuve d’une grande aptitude à se fondre avec la nature, notre niveau d’équipement ne nous place pas vraiment dans une situation aussi extrême même si nous sommes en effet très isoles et loin du monde. Serions-nous aptes à poursuivre ce voyage bien plus longtemps, quelques mois par exemple ? Devenir de véritables hommes (ou femmes) des bois capables de survivre en pleine nature en toutes circonstances ? |
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