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Il y a un peu plus d’un mois, il ne connaissait quasiment rien de la haute mer. A présent, il dispose d’une solide et authentique expérience lui permettant d’exploiter au mieux tant son matériel que ses ressources physiques et mentales en fonction des conditions rencontrées. Après quelques gouttes de pluie il y a deux jours, c’est aujourd’hui sous un franc soleil qu’il navigue cap plein ouest vers les côtes de la Guyane. Evoluant désormais dans le courant sud équatorial qu’il suit par la bordure nord, il en profite pour recharger à fond ses batteries et refaire ses stocks d’eau douce à l’aide du dessalinisateur. La tenue de son cap demeure compliquée car il ne peut utiliser son GPS en permanence en raison de ses modestes ressources énergétiques. Il suit donc sa route au compas et à l’estime pour se rapprocher au plus près du cap souhaité. Il y parvient de mieux en mieux. |
Le vent, qui reste soutenu, est orienté au nord-est, ce qui incite Marc à gagner le plus possible vers l’ouest en se rapprochant de la veine principale du courant avant d’infléchir son cap vers le sud-ouest et viser un point de contournement fictif à partir duquel il adoptera enfin le cap de l’Enfant Perdu qui marque l’arrivée (voir carte des courants en bas de page). Pour l’heure, il se trouve précisément sur la latitude de Cayenne et toute la route qu’il pourrait désormais faire vers le sud constituerait autant de distance à rattraper vers le nord, ce qui avec un vent globalement orienté au nord-est peut s’avérer difficile, même si le flux équatorial pousse dans la bonne direction. Par ailleurs, si les skippers savent que ce courant est particulièrement fort le long des côtes, ainsi qu’en attestent les cartes de Mercator Ocean, que se passe t-il lorsque le vent le croise par la perpendiculaire, ce qui est précisément le cas actuellement ? On peut légitimement penser que plus le vent de nord-est est fort, plus la mer risque d’être formée, à l’instar ce qui se passe au Raz Blanchard ou au Raz de Sein lorsque des vents soutenus sont contraires ou travers aux courants de flot ou de jusant par forts coefficients. De même, il est difficile de connaître le point d’équilibre entre ces forces : le courant bien que puissant permettrait-il à une embarcation à rames de suivre une route au plus près du vent si celui-ci venait du nord ou du nord-est ? L’un des dangers réside précisément dans le risque d’un vent fort qui malgré la puissance du courant pourrait pousser les embarcations vers l’ouest et le sud/ouest et vers l’embouchure de l’Amazone, une vaste zone sous l’influence des courants de marées où la profondeur est très faible et la navigation compliquée. Un skipper égaré dans ces parages porté vers la côte par des vents de nord-est aurait le plus grand mal à rejoindre ensuite la Guyane. Ainsi, même si Marc se trouve encore à près de 900 milles de l’arrivée, c’est dés à présent qu’il doit préparer son approche en anticipant tout événement météorologique qui pourrait compromettre sa route initialement prévue. Les prévisions météorologiques (UGRIB) n’annoncent aucun événement ce cette nature au moins jusqu’au 5 mars. La tendance semble même plutôt à l’accalmie sur zone en dépit de quelques risques de pluie. Néanmoins, son arrivée n'étant pas prévue - au mieux - avant le 15 mars, Marc reste encore soumis à plus de 10 jours d’incertitude pendant lesquels tout peut arriver. Dans ce contexte, il lui importe d'anticiper son approche dés maintenant afin de parer à toute éventualité. S’il est conscient de tous ces éléments, c’est malgré tout avec la même sérénité qui le caractérise depuis le départ de cette aventure qu’il s’apprête à négocier cette étape délicate de son voyage océanique. La navigation à bord de ce genre d'embarcation sur ce type de mer n'est résolument pas un domaine de certitudes mais assurément de plausibilités qu'il convient de prendre en compte au plus tôt. |
![]() ![]() ![]() ![]() Alizés = vents dominant sur l’Atlantique entre l’Afrique occidentale et l’arc antillais |
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